Toronto 2016 : Raoul Peck, Mbithi Myasa, Rahmatou Keita, Raja Amari, Lupita Nyong'o et Nollywood
Deux prix du Public et le Prix de la Critique, pour l'Afrique et la Diaspora. Soutenu par l'OIF, le film Hissein Habré projeté au festival canadien.
Raoul Peck, plébiscité par le Public, avec l'Ougandaise d'adoption Mira Nair
Au Canada, le long métrage documentaire Je ne suis pas votre Nègre de l'Haïtien Raoul Peck remporte le Prix du Public (Grolsch People's Choice Documentary Award) au Festival International du Film de Toronto (TIFF 2016), la 41è édition qui s'est tenue du 08 au 18 septembre.
A sa mort, l'écrivain James Baldwin (1924-1987) laisse inachevé Remember this House qui documentait la vie ainsi que le meurtre de ses amis Martin Luther King Jr, Medgar Evers (membre de la NAACP) et Malcolm X. Dans JE NE SUIS PAS VOTRE NÈGRE, Raoul Peck reconstitue le livre : un récit radical sur la question raciale aux États-Unis, en utilisant exclusivement les mots-mêmes de l'auteur africain-américain. Partant du récit des vies et des assassinats des trois héros assassinés durant le combat pour les droits civiques, le film explore la relation irrationnelle qu'un pays si contradictoire (prétendument post-racial, depuis l'élection d'un président métis - voire considéré comme Noir -, Barak Obama) entretient à la question de la race. Les mots de James Baldwin sont lus par Samuel L. Jackson dans la version originale américaine du film et par JoeyStarr dans la version (doublée) française.
Je ne suis pas votre Nègre (I Am Not Your Negro) sera diffusé sur Arte le 2 novembre 2016, annonçait Télérama - en citant le film de Raoul Peck (9/10, avec le film Hissein Habré de Mahamat-Saleh Haroun prévu pour le 1er trimestre 2017 toujours sur la chaîne Arte) - dans leur portfolio des 10 documentaires à ne pas rater prochainement à la télé. Le film sortira en salle aux États-Unis avant la fin de l'année où il sera distribué par Magnolia Pictures et dans le reste du monde à partir de début 2017. Il n'a pas encore de distributeur français, selon le communiqué de presse parvenu à notre rédaction.
Outre ce film du génial cinéaste haïtien, le public de Toronto a récompensé un film africain également : Queen of Katwe (Ouganda / Afrique du Sud) de la réalisatrice indienne Mira Nair, avec Lupita Nyong'o et David Oyelowo dans les rôles titres aux côtés de Madina Nalwanga qui débute au cinéma ; elle interprète ici une jeune fille se découvrant une passion pour le jeu des échecs, dans le monde rural de l'Ouganda. Elle s'investit et donne vit à son rêve : devenir une championne internationale. En Première mondiale à Toronto, le film arrive Deuxième Finaliste du Prix du Public, en Fiction (Grolsch People's Choice Award, 2nd Runner up)
Le réalisateur Mbithi Masya (Kenya) rafle le Prix de la Critique Internationale
Le Prix FIPRESCI (Fédération Internationale de la Presse Cinématographique) a été décerné à Mbithi Masya pour Kati Kati. Le jury s'est dit frappé par le "ton généreux et poétique, sans une once de colère personnelle ou d'injustice politique" de ce premier long métrage provenant d'une " nouvelle voix piquante et unique au cinéma ", en l'occurrence son réalisateur. Kati Kati ("Entre les deux" en swahili) nous plonge dans le tourment des violences politiques qui ont ravagé le Kenya il y a un peu moins d'une décennie.
Une fenêtre mondiale
Le principal intérêt du Festival de Toronto ce ne sont pas seulement les prix, c'est la formidable exposition qu'il offre, car c'est le plus grand marché de film (devant Cannes) et le plus grand d'Amérique du Nord. C'est aussi un festival qualifiant pour les Oscars. Alors qu'un festival de premier rang comme Cannes s'ankylose dans un entre-soi, avec quelques rares présences africaines dans les sélections de films ou dans les jurys, à Toronto c'est plus d'une vingtaine de films africains qui sont retenus, plusieurs en Premières mondiales, dont une dizaine de Nollywood (section City to City). Comme à chaque édition, une ville est à l'honneur dans le programme City to City, Lagos étant choisie, Nollywood a bénéficié d'une large présence : Just Not Married, The Wedding Party, 93 Days, ou encore 76, pour ne citer que ceux là. La productrice Judith Audu a fait le déplacement à l'instar de l'acteur Richard (RMD) Mofe-Damijo ou encore l'actrice Genevieve Nnaji qui était en dialogue avec le réalisateur Kunle Afolayan. Président de l'African Film Consortium (AFC, Lagos), Mykel Parish a assisté au festival et a annoncé sur le forum interne de l'AFC un accord de financement de plusieurs millions de dollars pour des projets africains. Né en 1993, l'industrie de Nollywood traîne comme une plaie d'être toujours présentée comme " nouvelle " (même après 23 ans d'existence) et surtout de ne pas savoir se défaire de l'amateurisme de nombre de ses auteurs qui font plus du théâtre filmé que du cinéma. Des voix plus professionnelles et novatrices existent, incarnées par quelqu'un comme Kunle Afolayan qui cultive l'exigence ; il explique dans un entretien à paraître sur Africiné Magazine comment grâce à NollywoodWeek de Paris il a été contacté par Air France et la marque Peugeot pour un film supposé parler à un public international.
Rahmatou Keïta a projeté en Première Mondiale son premier long métrage de fiction L'Alliance d'or (Zin'naariyâ! | The Wedding Ring) avec sa fille Magaajyia Silberfeld dans le rôle principal donnant la réplique à la Guinéenne Mariam Kaba. C'est l'histoire de Tiyaa récemment de retour chez elle, dans le Sultanat de Zinder, après avoir fini ses études. La jeune femme essaie de surmonter le souvenir d'une histoire d'amour douloureuse. La promesse mystique d'un prince charmant souffle vers sa direction. Autre première très attendue, Corps étranger (Foreign Body) de Raja Amari où Samia (Sarra Hanachi), jeune immigrante sans papiers, trouve un travail dans une famille parisienne de la classe moyenne. Sa présence change dramatiquement les relations au sein des membres de la famille. La personne la plus dépendante n'est pas toujours celle qu'on croit...
Caméra d'Or au Festival de Cannes, prix qui récompense le meilleur Premier film toutes sections confondues, Divines de la Franco-Marocaine Houda Benyamina était dans la sélection.
Outre ces films et personnalités dont la critique Djia Mambu (Africiné Magazine / Africultures), il importe de souligner que le réalisateur tchadien Mahamat-Saleh Haroun était membre du Jury international 2016 dans le festival canadien. Son film Hissein Habré, une tragédie tchadienne - qui a bénéficié du soutien de l'OIF - a également été diffusé au Festival International du Film de Toronto (TIFF 2016), en section Masters.
Thierno I. Dia
Images Francophones
Crédit image : DR
Au Canada, le long métrage documentaire Je ne suis pas votre Nègre de l'Haïtien Raoul Peck remporte le Prix du Public (Grolsch People's Choice Documentary Award) au Festival International du Film de Toronto (TIFF 2016), la 41è édition qui s'est tenue du 08 au 18 septembre.
A sa mort, l'écrivain James Baldwin (1924-1987) laisse inachevé Remember this House qui documentait la vie ainsi que le meurtre de ses amis Martin Luther King Jr, Medgar Evers (membre de la NAACP) et Malcolm X. Dans JE NE SUIS PAS VOTRE NÈGRE, Raoul Peck reconstitue le livre : un récit radical sur la question raciale aux États-Unis, en utilisant exclusivement les mots-mêmes de l'auteur africain-américain. Partant du récit des vies et des assassinats des trois héros assassinés durant le combat pour les droits civiques, le film explore la relation irrationnelle qu'un pays si contradictoire (prétendument post-racial, depuis l'élection d'un président métis - voire considéré comme Noir -, Barak Obama) entretient à la question de la race. Les mots de James Baldwin sont lus par Samuel L. Jackson dans la version originale américaine du film et par JoeyStarr dans la version (doublée) française.
Je ne suis pas votre Nègre (I Am Not Your Negro) sera diffusé sur Arte le 2 novembre 2016, annonçait Télérama - en citant le film de Raoul Peck (9/10, avec le film Hissein Habré de Mahamat-Saleh Haroun prévu pour le 1er trimestre 2017 toujours sur la chaîne Arte) - dans leur portfolio des 10 documentaires à ne pas rater prochainement à la télé. Le film sortira en salle aux États-Unis avant la fin de l'année où il sera distribué par Magnolia Pictures et dans le reste du monde à partir de début 2017. Il n'a pas encore de distributeur français, selon le communiqué de presse parvenu à notre rédaction.
Outre ce film du génial cinéaste haïtien, le public de Toronto a récompensé un film africain également : Queen of Katwe (Ouganda / Afrique du Sud) de la réalisatrice indienne Mira Nair, avec Lupita Nyong'o et David Oyelowo dans les rôles titres aux côtés de Madina Nalwanga qui débute au cinéma ; elle interprète ici une jeune fille se découvrant une passion pour le jeu des échecs, dans le monde rural de l'Ouganda. Elle s'investit et donne vit à son rêve : devenir une championne internationale. En Première mondiale à Toronto, le film arrive Deuxième Finaliste du Prix du Public, en Fiction (Grolsch People's Choice Award, 2nd Runner up)
Le réalisateur Mbithi Masya (Kenya) rafle le Prix de la Critique Internationale
Le Prix FIPRESCI (Fédération Internationale de la Presse Cinématographique) a été décerné à Mbithi Masya pour Kati Kati. Le jury s'est dit frappé par le "ton généreux et poétique, sans une once de colère personnelle ou d'injustice politique" de ce premier long métrage provenant d'une " nouvelle voix piquante et unique au cinéma ", en l'occurrence son réalisateur. Kati Kati ("Entre les deux" en swahili) nous plonge dans le tourment des violences politiques qui ont ravagé le Kenya il y a un peu moins d'une décennie.
Une fenêtre mondiale
Le principal intérêt du Festival de Toronto ce ne sont pas seulement les prix, c'est la formidable exposition qu'il offre, car c'est le plus grand marché de film (devant Cannes) et le plus grand d'Amérique du Nord. C'est aussi un festival qualifiant pour les Oscars. Alors qu'un festival de premier rang comme Cannes s'ankylose dans un entre-soi, avec quelques rares présences africaines dans les sélections de films ou dans les jurys, à Toronto c'est plus d'une vingtaine de films africains qui sont retenus, plusieurs en Premières mondiales, dont une dizaine de Nollywood (section City to City). Comme à chaque édition, une ville est à l'honneur dans le programme City to City, Lagos étant choisie, Nollywood a bénéficié d'une large présence : Just Not Married, The Wedding Party, 93 Days, ou encore 76, pour ne citer que ceux là. La productrice Judith Audu a fait le déplacement à l'instar de l'acteur Richard (RMD) Mofe-Damijo ou encore l'actrice Genevieve Nnaji qui était en dialogue avec le réalisateur Kunle Afolayan. Président de l'African Film Consortium (AFC, Lagos), Mykel Parish a assisté au festival et a annoncé sur le forum interne de l'AFC un accord de financement de plusieurs millions de dollars pour des projets africains. Né en 1993, l'industrie de Nollywood traîne comme une plaie d'être toujours présentée comme " nouvelle " (même après 23 ans d'existence) et surtout de ne pas savoir se défaire de l'amateurisme de nombre de ses auteurs qui font plus du théâtre filmé que du cinéma. Des voix plus professionnelles et novatrices existent, incarnées par quelqu'un comme Kunle Afolayan qui cultive l'exigence ; il explique dans un entretien à paraître sur Africiné Magazine comment grâce à NollywoodWeek de Paris il a été contacté par Air France et la marque Peugeot pour un film supposé parler à un public international.
Rahmatou Keïta a projeté en Première Mondiale son premier long métrage de fiction L'Alliance d'or (Zin'naariyâ! | The Wedding Ring) avec sa fille Magaajyia Silberfeld dans le rôle principal donnant la réplique à la Guinéenne Mariam Kaba. C'est l'histoire de Tiyaa récemment de retour chez elle, dans le Sultanat de Zinder, après avoir fini ses études. La jeune femme essaie de surmonter le souvenir d'une histoire d'amour douloureuse. La promesse mystique d'un prince charmant souffle vers sa direction. Autre première très attendue, Corps étranger (Foreign Body) de Raja Amari où Samia (Sarra Hanachi), jeune immigrante sans papiers, trouve un travail dans une famille parisienne de la classe moyenne. Sa présence change dramatiquement les relations au sein des membres de la famille. La personne la plus dépendante n'est pas toujours celle qu'on croit...
Caméra d'Or au Festival de Cannes, prix qui récompense le meilleur Premier film toutes sections confondues, Divines de la Franco-Marocaine Houda Benyamina était dans la sélection.
Outre ces films et personnalités dont la critique Djia Mambu (Africiné Magazine / Africultures), il importe de souligner que le réalisateur tchadien Mahamat-Saleh Haroun était membre du Jury international 2016 dans le festival canadien. Son film Hissein Habré, une tragédie tchadienne - qui a bénéficié du soutien de l'OIF - a également été diffusé au Festival International du Film de Toronto (TIFF 2016), en section Masters.
Thierno I. Dia
Images Francophones
Crédit image : DR