Succès historique dans les salles d’Afrique francophone pour « Les trois lascars »
Avec 56 652 entrées payantes réparties sur 12 pays, le film de Boubakar Diallo est le film d’Afrique francophone qui a obtenu le plus de recettes dans les salles du continent depuis… le siècle dernier !
Boubakar Diallo, auteur des « Trois lascars », est un habitué des succès populaires. Depuis son premier long-métrage « Traque à Ouaga » (2004), il a su remplir les salles en enchaînant une quinzaine de films en moins de vingt ans. A plusieurs reprises, il a frôlé les 50 000 entrées mais la dégradation du parc de salles, entamée dès le début de sa carrière, et la quasi-disparition des réseaux de distribution ne lui ont pas permis d’aller au-delà. Jusqu’à ces dernières semaines, le plus grand succès du box-office pour un film africain en Afrique francophone au XXIè siècle restait « Tasuma », long-métrage de Kollo Sanou, sorti en 2004 dans six pays avec le soutien du programme Africa Cinémas, et qui avait ainsi pu atteindre 49 000 entrées[1]. Un chiffre qui peut paraître très modeste si on le compare aux 500 000 entrées du film « Buud Yam », de Gaston Kaboré, sorti sept ans plus tôt.
Mais, depuis la fin des années 90, le parc de salles de cinéma d’Afrique francophone a connu une dégradation continue que le passage au numérique a mis très longtemps à enrayer. En 2011, on comptait une seule salle de cinéma équipée en numérique[2] sur les dix-huit pays francophones d’Afrique sub-saharienne, alors qu’à la même époque, la moitié des 5500 salles de cinéma françaises avaient achevé leur conversion. Dix ans plus tard, le cap des 50 salles opérationnelles en Afrique francophone était à peine franchi que le Covid donnait un coup d’arrêt au secteur de l’exploitation cinématographique.
C’est donc au regard de cette triple traversée du désert (effondrement du parc de salles, transition numérique tardive puis restrictions liées à la pandémie) qu’il faut regarder la sortie en salles du film « Les trois lascars ». Distribué par le Groupe Canal+, le film a connu une sortie commerciale dans douze pays, ce qui ne s’était jamais vu depuis plusieurs décennies.
LES TROIS LASCARS - CHIFFRES D'ENTREES PAR PAYS | |||||
Bénin | 2150 | Guinée Conakry | 1542 | ||
Burkina Faso | 22633 | Mali | 334 | ||
Cameroun | 1040 | Niger | 561 | ||
Congo Brazza | 1040 | Sénégal | 1215 | ||
Cote d'Ivoire | 24864 | RDC | 854 | ||
Gabon | 129 | Togo | 290 | ||
Total 12 Pays | 56652 | ||||
(Période d'exploitation : du 5 novembre 2021 au 11 janvier 2022 - chiffres fournis par Canal+ et Les Films du Dromadaire) | |||||
Contrairement à « Tasuma » qui avait enregistré la plupart de ses entrées au Burkina Faso, le film « Les trois lascars » a obtenu son plus grand succès en Côte d’Ivoire (43,9 % des entrées), devant le Burkina Faso (40 %), le Bénin (3,8 %) et la Guinée (2,7 %).
Ces chiffres montrent à quel point la coproduction peut-être efficace. Le film est en effet une coproduction ivoiro-franco-burkinabè (Les films d’Avalon, Alma Production et Les films du Dromadaire). C’est en tant que coproduction Sud-Sud qu'il a pu recevoir le soutien du FONSIC (Fonds de soutien à l’industrie cinématographique de Côte d’Ivoire) dans le cadre du projet Clap ACP.
Les deux tiers de l’apport du FONSIC (qui a financé le film à hauteur de 30 % de son budget) proviennent en effet du financement européen (« Bonus ACP-UE ») apporté dans le cadre de ce projet mis en œuvre par l’OIF et le FONSIC avec le soutien de l’Organisation des Etats d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique. Le reste du budget a été apporté par le groupe Canal +, TV5Monde, la Direction du cinéma du Burkina Faso et… le Fonds Image de la Francophonie qui a accordé une aide à la finition.
[1] Source : Ghislain de Rincquesen et Kitia Touré, Logiconsult : « Evaluation rétrospective et conjointe du programme Africa cinémas » relatif aux activités concourant à la distribution des films africains en Afrique (2003-2005), juin 2006
[2] Le cinéma « Le Normandie » à Ndjaména.