Jean-Pierre Bekolo et le Fespaco "Le Fespaco est un lieu d'adoption"
En prélude au 50 ans du Fespaco, Jean-Pierre Bekolo témoigne dans une série produite par Cinékap avec la particiupation de l'OIF et de TV5Monde
Sans le Fespaco, je n'aurais jamais été panafricaniste, je n'aurais jamais pu rencontrer les cinéastes de tous les pays. Le Fespaco est un lieu d'adoption à l'africaine. On t'adopte, on te dit : " Tu es l'un de nos fils, l'un de nos frères et voilà ce qu'il faut faire, n'oublie jamais ceci ni cela… " Même Djibril Diop Mambety, qui n'était pas bavard, te glissait une petite phrase et ça te restait dans la tête toute ta vie. Tels sont les premiers mots du franco-camerounais pour exprimer toute sa recionnaissance à l'événement panafricain.
Le Fespaco, pour moi, c'est aussi… Blaise Compaoré. Je dis cela parce que ça a été un choc, après tout ce qu'on avait entendu quand Sankara a été assassiné ! a ce moment-là, mon père était commissaire de police et il avait l'habitude se moquer de tous les révolutionnaires mais il a presque pleuré. Donc je me retrouve au Fespaco et comme j'avais eu un prix et que Blaise serrait la main à tous ceux qui avaient eu des prix, il me serre la main et je ne sais pas quoi penser. Est-ce que j'ai le pouvoir de dire quelque chose ici ? C'est comme ça, c'est l'Afrique... Tu vis l'Afrique avec ses drames et ses conflits et tu finis par l'accepter.
Il y aussi un moment où, comme dans toutes les familles, le Fespaco t'énerve. Tu as une projection qui s'est mal passée ou un problème technique ou un document qui n'est pas arrivé et tu dis : " Je ne reviendrai plus jamais au Fespaco ". L'année où j'ai pensé cela, on m'avait m'appelé à midi pour me dire " Tu voyages à 15 h ". Et je n'étais pas parti. Et plus tard, j'ai entendu qu'on m'avait décerné un prix et qu'on m'appelé en vain parce que je n'étais pas là. C'est l'année où j'ai le plus regretté le Fespaco. Sans même y penser, on a créé notre manière de faire un festival et je ne sais pas si quelqu'un a théorisé cela. Il y a une manière d'être africain, il y a une manière de respecter les anciens, il y a une manière d'aimer ce que les gens font, etc. Mais, au fond, et c'est la force du Au final, avec le Fespaco, le Burkina Faso a permis au cinéma d'être africain. Le Fespaco nous a permis d'être africains avec beaucoup de dignité et beaucoup de modestie et il ne faut pas l'oublier.
Propos recueillis par Balufu Bakupa-Kanyinda (entretien Cinékap)
KAD
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