Fonds Image de la Francophonie : du nouveau, dès le 5 janvier
Nouvelles aides au développement et coup de pouce aux pays les moins nantis.
Dès le 5 janvier 2019, le Fonds Image de la Francophonie propose deux nouvelles possibilités : d’une part, des aides au développement accessibles aux auteurs et, d’autre part, des aides à la finition qui seront désormais cumulables avec des aides à la production accordées précédemment. Mais ces possibilités supplémentaires seront réservées à une partie seulement des 37 pays éligibles au fonds : cette liste de « privilégiés » comprend 16 pays [1] considérés comme les plus démunis. Elle correspond aux pays classés par la Banque mondiale comme « à faible revenu » (cette classification reflète le revenu national brut par habitant). Le fait d’adopter directement une politique de discrimination positive aurait transformé l’accès au fonds en une course à handicap. Dans les courses de chevaux ainsi nommées, les favoris voient leur selle lestée de plomb, afin de donner plus de chances à leurs adversaires moins brillants. Rien de cela au Fonds Image de la Francophonie : les aides à la production ou à la finition iront toujours aux meilleurs projets, quels que soient leurs pays d’origine. Cependant, les 16 pays désormais privilégiés se verront offrir des possibilités supplémentaires : ils seront les seuls à pouvoir bénéficier d’un coup de pouce au départ et à l’arrivée.
Au départ, ce seront des aides au développement. Jusqu’ici, ce type d’aide n’était accordé que de façon exceptionnelle, soit à l’occasion d’opérations spéciales (pour les séries TV en 2014 et pour les programmes jeunesse en 2015), soit, sur décision de la commission, à partir d’une demande « classique » d’aide à la production. Désormais, un auteur peut soumettre un projet même s’il n’a pas encore signé de contrat avec un producteur.
A l’arrivée, ce sera le retour du cumul aide à la production/aide à la finition. Des projets bénéficiaires d’une aide à la production pourront présenter une nouvelle demande au titre de l’aide à la finition. Cette possibilité avait existé pour la commission cinéma jusqu’en 2016. Elle n’est rétablie que pour le groupe des 16 pays « prioritaires ».
D’où viennent ces nouvelles mesures ? Principalement d’un bilan de l’action du fonds, qui a fêté ses trente ans en 2018. Né en 1988 et mis sur les rails en 1990 (avec plusieurs commissions de sélection par an dès cette année-là), le fonds d’aide de la Francophonie s’est offert (et a offert à ses utilisateurs) quelques cadeaux pour son trentième anniversaire : une bande-annonce, une liste complète des projets aidés depuis l’origine consultable en ligne et, enfin, un évaluation des dix dernières années de fonctionnement, qui a permis de mettre en évidence les adaptations nécessaires et en particulier le rééquilibrage en faveur de pays où les producteurs ont plus de difficultés à accéder aux financements.
Depuis 2009, le fonds de l’OIF a connu des évolutions très spectaculaires. La première concerne le nombre de dossiers reçus, qui a presque triplé, passant de 111 en 2009 à 303 en 2017, avant de connaître en 2018 un léger tassement (245 demandes reçues) qui pourrait s’expliquer en partie par le lancement, la même année, du Fonds Jeune création francophone, qui a reçu, dès le premier appel, 134 dossiers éligibles.
La deuxième évolution constatée est la diminution du nombre de projets aidés, laquelle, compte tenu de l’augmentation de la demande, a rendu le fonds de l’OIF trois à quatre fois plus sélectif au cours des dix années écoulées. En 2009, 43 % des projets soumis bénéficiaient d'une aide. En 2017 et 2018, la proportion était, respectivement de 11,5 et 13,5 %.
Cette tendance est un gage de qualité des projets soutenus mais elle a pour inconvénient de réduire considérablement les chances des pays où les possibilités de financement locales sont les plus limitées. On constate ainsi que la part des 16 pays à faible revenu éligibles au fonds est passée de 53 % en 2009 à 31 % en 2018. Si l’on retranche les chiffres du Sénégal, pays le plus dynamique du groupe "à revenu faible" et qui appartenait encore à la catégorie « revenu intermédiaire » jusqu’en 2016, on constate un déclin encore plus marqué. Les 15 pays à revenu faible – hors Sénégal – sont passés de 44,6 % en 2009 à 19,18 % en 2018.
C’est ce constat qui a amené l’OIF à adopter la politique du « coup de pouce » en faveur des pays à revenu faible. Cette politique ne pénalisera que très peu les pays les plus dynamiques (notamment la Tunisie, devenue ces dernières années la première bénéficiaire du Fonds Image de la Francophonie). En effet, les aides au développement nouvellement introduites seront financées en partie sur des budgets extérieurs au fonds. Seul le « coup de pouce » introduit au niveau des aides à la finition pourrait bousculer la hiérarchie établie ces dernières années. Mais cette évolution, si elle a lieu, se fera dans des conditions vertueuses, avec une concurrence accrue et une règle du jeu inchangée : que le meilleur gagne ! Simplement, le meilleur gagnera plus s'il appartient au groupe des pays à revenu faible.
Pierre Barrot
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Photo-montage : Marguerite Abouet, présidente de la commission documentaires/séries et Rithy Panh (photo Omar Havana), président de la commission Cinéma-fiction du Fonds Image de la Francophonie.
[1] Bénin, Burkina Faso, Burundi, Comores, Guinée, Guinée-Bissau, Haïti, Madagascar, Mali, Niger, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Rwanda, Sénégal, Tchad, Togo.