Décès à Paris des réalisateurs Farouk Beloufa et As Thiam
Le cinéaste algérien et son homologue sénégalais se sont fait connaître chacun par une œuvre particulière ayant contribué à leur réputation mondiale.
Dans la soirée du lundi 16 avril, à 20h35, Merzak Allouache poste sur sa page facebook une photo avec un court commentaire : « Grande tristesse. Farouk Beloufa nous a quittés. Une photo de notre jeunesse à l'institut du cinéma d'Alger quand nous rêvions d'être des réalisateurs... ». Le décès est survenu une semaine plus tôt, précisément le 9 avril 2018, du haut de ses 71 ans, à Paris, la capitale française où il s’est établi depuis 1992. Son fils Neil Beloufa (le cinéaste et plasticien franco-algérien) y a vu le jour.
« Une semaine après son décès, le ministère de la Culture algérien n’a toujours pas réagi », soulignait la Rédaction du HuffPost Algérie. Farouk Beloufa est né en 1947 et a étudié le cinéma à l’Institut National du Cinéma à Alger et poursuit ses études en France, à l’IDHEC (Fémis) où il obtient son diplôme en 1967. Il suit également des cours à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes sous la direction de Roland Barthes. En parallèle, il présente une thèse sur la théorie du cinéma. Après deux courts-métrages (Situation de transition - 1966 et Travestis et cassures noir sur blanc - 1967), il réalise le documentaire Insurrectionnelles (1973) qui sera censuré et remonté par les autorités algériennes sous le titre La guerre de Libération. Après ses déconvenues avec les ciseaux de Dame Anastasie (sainte-patronne des censeurs), il travaillera comme assistant avec Youcef Chahine sur le film Le retour de l’enfant prodigue (1976) et tournera quelque temps plus tard le mythique Nahla (1979), un « film capital dans le cinéma mondial » estime notre rédacteur Samir Ardjoum, un des meilleurs connaisseurs du cinéma.
En 2010, Farouk Beloufa revient avec Le Silence du Sphinx (court métrage qui figure dans le DVD Nahla édité par les Mutins de Pangée). « Le cinéma, c'est une question de regard. Ce qui est montré est en résonance avec celui qui pose ce regard. Et son récit permet de décrypter et l'identité, et ce qui fait sens à ses yeux à un premier niveau », confiait-il à notre rédacteur Samir Ardjoum dans un entretien paru le 30 janvier 2010 dans le quotidien El Watan (Algérie) et repris sur Africiné Magazine (Dakar).
Auteur d’un long métrage unique, le cinéaste n’en a pas point marqué le continent africain et le cinéma. Quant à son fils Neil Beloufa, il continue à creuser le sillon : son film Occidental est sur les écrans français depuis le 28 mars 2018.
Le regretté As Thiam, cinéaste sénégalais.
La triste information nous est parvenue par Latérit : As Thiam, réalisateur sénégalais, est mort. À l’instar de Farouk Beloufa, il vivait à Paris où il a rendu l’âme après s’être vaillamment battu et longuement contre des soucis de santé. Il a commencé sa carrière à la Télévision Scolaire Sénégalaise (TSS) où je l’ai connu : j’y ai été acteur pour les films éducatifs diffusés dans les écoles. D’une grande curiosité intellectuelle et d’une grande sensibilité, il aura fait relativement peu de films, en dehors de ses productions institutionnelles. Marie-Clémence Paes et César Paes ont produit son lumineux Le Sifflet, court métrage multiprimé. Tanit de bronze au festival de Carthage 2004, Prix du public au festival Plein sud de Cozes, également primé au Festival international du cinéma africain et latino-américain de Milan et au FESPACO de Ouagadougou, entre autres trophées et sélections, la musique est signée Wasis Diop.
Film drôlatique, il met en scène la brillante Mame Ndoumbé Diop, qui a incarné la femme de Guelwaar dans long métrage éponyme de Sembène Ousmane et la grand-mère dans L’absence de Mama Keïta, 2009) et le regretté James Campbell. Si chez Aladdin c’est une lampe qui exauce les vœux chez c’est un sifflet qui réalise le vœu de la personne soufflant dedans. Le merveilleux n’est qu’un prétexte pour As Thiam à proposer (sans recourir véritablement aux effets spéciaux) une réflexion universelle sur le pouvoir, le dialogue ou pas dans un couple, le machisme jamais éclairé et le futur. Il casse les codes à tous les niveaux. Ses personnages sont filmés dans le décor verdoyant des Niayes, en bordure de Dakar, contrastant avec l’aridité habituelle des images d’Afrique voire le bétonnage du paysage urbain. Il étrille avec intelligence la violence des mâles s’exerçant jusqu’à l’intérieur du couple. On ne peut dès lors que regretter qu’il n’ait fait plus de films. As Thiam s’est très tôt engagé également pour la diffusion du cinéma. C’est ainsi qu’il a été très impliqué au festival de Cozes (Saint-Georges de Didonne, vers Royan), aux côtés de Marc Sauvaget, le premier directeur du festival.
Producteur, réalisateur et consultant en communication, ses films de fictions et documentaires ont été diffusés sur TV5, CFI et RFO (actuelle France Ô). Il co-écrit le documentaire Lettre à Senghor (1998) avec le regretté Samba Félix Ndiaye qui en est le réalisateur.
Une cérémonie mortuaire pour As THIAM s’est tenue le Samedi 21 avril 2018, à 10h, au Funérarium des Batignolles (Clichy, en région parisienne), avant que son corps ne soit amené au Sénégal pour son enterrement (il est de la ville de Pikine, dans la banlieue de Dakar).
Thierno I. Dia
Images Francophones
Crédit : DR
« Une semaine après son décès, le ministère de la Culture algérien n’a toujours pas réagi », soulignait la Rédaction du HuffPost Algérie. Farouk Beloufa est né en 1947 et a étudié le cinéma à l’Institut National du Cinéma à Alger et poursuit ses études en France, à l’IDHEC (Fémis) où il obtient son diplôme en 1967. Il suit également des cours à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes sous la direction de Roland Barthes. En parallèle, il présente une thèse sur la théorie du cinéma. Après deux courts-métrages (Situation de transition - 1966 et Travestis et cassures noir sur blanc - 1967), il réalise le documentaire Insurrectionnelles (1973) qui sera censuré et remonté par les autorités algériennes sous le titre La guerre de Libération. Après ses déconvenues avec les ciseaux de Dame Anastasie (sainte-patronne des censeurs), il travaillera comme assistant avec Youcef Chahine sur le film Le retour de l’enfant prodigue (1976) et tournera quelque temps plus tard le mythique Nahla (1979), un « film capital dans le cinéma mondial » estime notre rédacteur Samir Ardjoum, un des meilleurs connaisseurs du cinéma.
En 2010, Farouk Beloufa revient avec Le Silence du Sphinx (court métrage qui figure dans le DVD Nahla édité par les Mutins de Pangée). « Le cinéma, c'est une question de regard. Ce qui est montré est en résonance avec celui qui pose ce regard. Et son récit permet de décrypter et l'identité, et ce qui fait sens à ses yeux à un premier niveau », confiait-il à notre rédacteur Samir Ardjoum dans un entretien paru le 30 janvier 2010 dans le quotidien El Watan (Algérie) et repris sur Africiné Magazine (Dakar).
Auteur d’un long métrage unique, le cinéaste n’en a pas point marqué le continent africain et le cinéma. Quant à son fils Neil Beloufa, il continue à creuser le sillon : son film Occidental est sur les écrans français depuis le 28 mars 2018.
Le regretté As Thiam, cinéaste sénégalais.
La triste information nous est parvenue par Latérit : As Thiam, réalisateur sénégalais, est mort. À l’instar de Farouk Beloufa, il vivait à Paris où il a rendu l’âme après s’être vaillamment battu et longuement contre des soucis de santé. Il a commencé sa carrière à la Télévision Scolaire Sénégalaise (TSS) où je l’ai connu : j’y ai été acteur pour les films éducatifs diffusés dans les écoles. D’une grande curiosité intellectuelle et d’une grande sensibilité, il aura fait relativement peu de films, en dehors de ses productions institutionnelles. Marie-Clémence Paes et César Paes ont produit son lumineux Le Sifflet, court métrage multiprimé. Tanit de bronze au festival de Carthage 2004, Prix du public au festival Plein sud de Cozes, également primé au Festival international du cinéma africain et latino-américain de Milan et au FESPACO de Ouagadougou, entre autres trophées et sélections, la musique est signée Wasis Diop.
Film drôlatique, il met en scène la brillante Mame Ndoumbé Diop, qui a incarné la femme de Guelwaar dans long métrage éponyme de Sembène Ousmane et la grand-mère dans L’absence de Mama Keïta, 2009) et le regretté James Campbell. Si chez Aladdin c’est une lampe qui exauce les vœux chez c’est un sifflet qui réalise le vœu de la personne soufflant dedans. Le merveilleux n’est qu’un prétexte pour As Thiam à proposer (sans recourir véritablement aux effets spéciaux) une réflexion universelle sur le pouvoir, le dialogue ou pas dans un couple, le machisme jamais éclairé et le futur. Il casse les codes à tous les niveaux. Ses personnages sont filmés dans le décor verdoyant des Niayes, en bordure de Dakar, contrastant avec l’aridité habituelle des images d’Afrique voire le bétonnage du paysage urbain. Il étrille avec intelligence la violence des mâles s’exerçant jusqu’à l’intérieur du couple. On ne peut dès lors que regretter qu’il n’ait fait plus de films. As Thiam s’est très tôt engagé également pour la diffusion du cinéma. C’est ainsi qu’il a été très impliqué au festival de Cozes (Saint-Georges de Didonne, vers Royan), aux côtés de Marc Sauvaget, le premier directeur du festival.
Producteur, réalisateur et consultant en communication, ses films de fictions et documentaires ont été diffusés sur TV5, CFI et RFO (actuelle France Ô). Il co-écrit le documentaire Lettre à Senghor (1998) avec le regretté Samba Félix Ndiaye qui en est le réalisateur.
Une cérémonie mortuaire pour As THIAM s’est tenue le Samedi 21 avril 2018, à 10h, au Funérarium des Batignolles (Clichy, en région parisienne), avant que son corps ne soit amené au Sénégal pour son enterrement (il est de la ville de Pikine, dans la banlieue de Dakar).
Thierno I. Dia
Images Francophones
Crédit : DR