Ciné Guimbi : bien assurer le passage du rêve à la réalité

En pleine Révolution au Burkina Faso, les porteurs du projet Il faut sauver le ciné Guimbi ont été initiés à la gestion axée sur les résultats par Africalia Belgique. Objectif : parvenir à une planification stratégique sur l’offre culturelle proposée par le nouveau Cinéma Guimbi.
« Il faut sauver le ciné Guimbi !» Paraphrasant volontiers le titre d’un film de Spielberg, ce projet est en passe de devenir un emblème du combat contre la fermeture des salles de cinéma en Afrique. Initié par l’Association de Soutien au Cinéma au Burkina Faso, il ambitionne de racheter, de reconstruire et de remettre en exploitation une salle fermée depuis 2005 à Bobo-Dioulasso, la seconde ville du pays.
Cependant, dans cette ville de plus d’un million d’habitants, la consommation familiale, voire individuelle, des images est depuis vingt ans une réalité, comme partout ailleurs dans le monde. Pour beaucoup de Bobolais[1], il ne s’agit que d’une gageure, sinon d’un éléphant blanc, un rêve d’illuminés dans une Afrique qui a bien d’autres préoccupations.
Et pourtant, le Ciné Guimbi renaît de ses cendres, car les actions entreprises par Berni Goldblat et son équipe sont de plus en plus visibles. Par une médiatisation particulièrement active dans le monde, à travers les festivals et les réseaux sociaux notamment, ils ont réussi à lever une partie des fonds pour un budget qui s’élève désormais à 1,300 million d’euros. Aujourd’hui, le site du cinéma est acquis et la construction de la petite salle de 200 places est amorcée. À l’horizon 2016, la grande salle de 350 places, l’administration, la cafétéria et la salle de formation en éducation à l’image seront fonctionnelles.
Guimbi est donc une réponse tangible à un défi, au départ fou. Pour en faire projet viable, qui génère ses propres ressources, l’Association de Soutien au cinéma du Burkina Faso a obtenu l’accompagnement d’Africalia (Belgique) pour initier ses membres dans la planification stratégique. C’est ainsi qu’un formateur – Luc Ameyede – a animé un atelier sur la gestion axée sur les résultats, du 27 octobre au 1er novembre.
Alors que la révolution fatale au régime Compaoré grondait dans les rues, les 26 participants venus du Burkina, d’Afrique et d’Europe, semblables aux musiciens de l’orchestre du Titanic continuant de jouer alors que le navire sombrait, se sont astreints à des exercices en apparence dantesques, au vu des circonstances. Il s’agissait ainsi de réinterroger la pertinence du projet pour savoir à quel besoin réel il répond ; de voir s’il prend en compte les attentes spécifiques des riverains ( en particulier les femmes du marché accoté au site) ; de se demander si les objectifs du projet ne divergent pas d’avec les politiques nationales et le contexte international ; si les produits qui seront proposés répondront aux attentes des publics du futur ciné et comment fidéliser ceux-ci ; dans cette optique des outils de planification des activités pour un management transparent ont été élaborés… Bref, en une semaine de travail intense, une prospective du projet Guimbi est née, destinée à transmuter le rêve des passionnés, qui se démènent depuis juin 2012, en actions réfléchies et concrètes.
La leçon semble être bien entendue. De nouveaux statuts et un organigramme de l’Association de soutien du Cinéma au Burkina sont en cours d’élaboration et devraient contribuer à renforcer l’assise sociétale du projet, tant à Bobo-Dioulasso, au Burkina Faso et dans le monde. Car, s’il est clair que Guimbi a une audience internationale d’envergure, il n’en demeure pas moins qu’il faut en faire un projet connu et revendiqué par les Bobolais, en l’occurrence les habitants du quartier Koko, les associations culturelles et les collectivités décentralisées de la ville.
Un premier test de cette assise sociétale a été fait le 14 novembre lors de la dernière projection dans ce qui est désormais l’ancien ciné Guimbi : plus de mille personnes sont venues pour assister à la projection du film Tu me prends pour qui ? du Burkinabè Oumar Dagnon. Les plus âgés voulaient se remémorer un passé mis entre parenthèses depuis deux décennies déjà ; les plus jeunes, qui constituent un des publics-cibles du projet entendaient se faire une idée de ce que fut le mythique ciné Guimbi, la seule salle qui, à la période coloniale, fut ouverte dans un quartier populaire.
A la fin, chacun est reparti, probablement convaincu que la réouverture du ciné Guimbi n’est pas d’un rêve passéiste mais d’un acte de résistance de citoyens ordinaires qui luttent pour garantir une offre culturelle qualitative et diversifiée à tous. Et cela, c’est une petite révolution dans la grande.
Sid-Lamine SALOUKA
Africiné, Bobo Dioulasso
pour Images Francophones
Crédit Photo : DR
[1] Habitants de Bobo-Dioulasso.
Cependant, dans cette ville de plus d’un million d’habitants, la consommation familiale, voire individuelle, des images est depuis vingt ans une réalité, comme partout ailleurs dans le monde. Pour beaucoup de Bobolais[1], il ne s’agit que d’une gageure, sinon d’un éléphant blanc, un rêve d’illuminés dans une Afrique qui a bien d’autres préoccupations.
Et pourtant, le Ciné Guimbi renaît de ses cendres, car les actions entreprises par Berni Goldblat et son équipe sont de plus en plus visibles. Par une médiatisation particulièrement active dans le monde, à travers les festivals et les réseaux sociaux notamment, ils ont réussi à lever une partie des fonds pour un budget qui s’élève désormais à 1,300 million d’euros. Aujourd’hui, le site du cinéma est acquis et la construction de la petite salle de 200 places est amorcée. À l’horizon 2016, la grande salle de 350 places, l’administration, la cafétéria et la salle de formation en éducation à l’image seront fonctionnelles.
Guimbi est donc une réponse tangible à un défi, au départ fou. Pour en faire projet viable, qui génère ses propres ressources, l’Association de Soutien au cinéma du Burkina Faso a obtenu l’accompagnement d’Africalia (Belgique) pour initier ses membres dans la planification stratégique. C’est ainsi qu’un formateur – Luc Ameyede – a animé un atelier sur la gestion axée sur les résultats, du 27 octobre au 1er novembre.
Alors que la révolution fatale au régime Compaoré grondait dans les rues, les 26 participants venus du Burkina, d’Afrique et d’Europe, semblables aux musiciens de l’orchestre du Titanic continuant de jouer alors que le navire sombrait, se sont astreints à des exercices en apparence dantesques, au vu des circonstances. Il s’agissait ainsi de réinterroger la pertinence du projet pour savoir à quel besoin réel il répond ; de voir s’il prend en compte les attentes spécifiques des riverains ( en particulier les femmes du marché accoté au site) ; de se demander si les objectifs du projet ne divergent pas d’avec les politiques nationales et le contexte international ; si les produits qui seront proposés répondront aux attentes des publics du futur ciné et comment fidéliser ceux-ci ; dans cette optique des outils de planification des activités pour un management transparent ont été élaborés… Bref, en une semaine de travail intense, une prospective du projet Guimbi est née, destinée à transmuter le rêve des passionnés, qui se démènent depuis juin 2012, en actions réfléchies et concrètes.
La leçon semble être bien entendue. De nouveaux statuts et un organigramme de l’Association de soutien du Cinéma au Burkina sont en cours d’élaboration et devraient contribuer à renforcer l’assise sociétale du projet, tant à Bobo-Dioulasso, au Burkina Faso et dans le monde. Car, s’il est clair que Guimbi a une audience internationale d’envergure, il n’en demeure pas moins qu’il faut en faire un projet connu et revendiqué par les Bobolais, en l’occurrence les habitants du quartier Koko, les associations culturelles et les collectivités décentralisées de la ville.
Un premier test de cette assise sociétale a été fait le 14 novembre lors de la dernière projection dans ce qui est désormais l’ancien ciné Guimbi : plus de mille personnes sont venues pour assister à la projection du film Tu me prends pour qui ? du Burkinabè Oumar Dagnon. Les plus âgés voulaient se remémorer un passé mis entre parenthèses depuis deux décennies déjà ; les plus jeunes, qui constituent un des publics-cibles du projet entendaient se faire une idée de ce que fut le mythique ciné Guimbi, la seule salle qui, à la période coloniale, fut ouverte dans un quartier populaire.
A la fin, chacun est reparti, probablement convaincu que la réouverture du ciné Guimbi n’est pas d’un rêve passéiste mais d’un acte de résistance de citoyens ordinaires qui luttent pour garantir une offre culturelle qualitative et diversifiée à tous. Et cela, c’est une petite révolution dans la grande.
Sid-Lamine SALOUKA
Africiné, Bobo Dioulasso
pour Images Francophones
Crédit Photo : DR
[1] Habitants de Bobo-Dioulasso.