Carré d'as d'Afrique francophone à Toronto : SIRA (lancé à Berlin) BANEL & ADAMA et MAMBAR PIERRETTE (vus à Cannes) et ...MBOA MATANDA - dont c'est la première mondiale.

Carré d'as ou plutôt … brelan de dames plus un  guerrier jusqu'ici inconnu au bataillon : aux côtés de 3 réalisatrices ayant récolté les prix et les critiques élogieuses  en début d'année à Berlin (Apolline Traoré, Prix du Public) et à Cannes (Ramata Toulaye-Sy seul premier film en Compétition officielle, Rosine Mbakam qui enchaîne les grands festivals avec sa première fiction), le cinéaste d'animation camerounais Jules Kalla Eyango fera ainsi la première mondiale de son tout premier court-métrage au prestigieux festival canadien. 

Remarqués au Yaoundé Film Lab 2021 par le regretté Dieudonné Alaka, Eyango et son acolyte-monteur-producteur Francis Leudjeu (Fondateur d'ABYL Studios) ont convaincu les commissions des 2 fonds gérés par l'OIF (Fonds Image de la Francophonie et Fonds Francophonie TV5MONDEplus) pour boucler en 2 ans un film d'animation de 15 minutes de niveau international : MBOA MATANDA, LE TOURNOI DES ROIS. Le projet a par ailleurs su s'insérer dans plusieurs dispositifs proposés par le programme Clap ACP :  Bonus financier ACP-UE, accompagnement en écriture d'Initiative Film (Isabelle Fauvel, Rémi Giordano) et de PaperToFilm, résidence de gestion de production d'animation des Gobelins (organisée par le Fonsic, partenaire de Clap ACP, à Abidjan), résidence Anim'Ato Mada pendant près de 2 mois à Majunga (RFC Madagascourt dirigées par Laza). C'est justement Laza Razanajatovo, intervenant en coproduction sur le film, qui l'a présenté au Short Film Corner de Cannes, où il sera remarqué par la programmatrice du TIFF. Coup d'essai, coup de maître, puisque MBOA MATANDA sera le seul court-métrage africain de la sélection de Toronto cette année (43 CM en tout dont 5 d'animation), avec une notule de présentation très élogieuse : “Par une brillante fusion entre le langage du cinéma d'animation et les thèmes, traditions et histoires de l'Afrique, Eyango nous offre un conte palpitant, la dernière bataille d'un guerrier endeuillé” (Short Cut Programme #04).

SIRA le film épique d'Apolline Traoré (Burkina Faso) qui a triomphé à Berlin puis au Fespaco (Etalon d'argent) et BANEL & ADAMA premier long de Ramata Toulaye-Sy (Sénégal), dont le court ASTEL avait été primé à … Toronto, ont également bénéficié du Bonus ACP-UE réservé aux coproductions Sud-Sud, et ont toutes deux, malgré des tournages particulièrement difficiles (dans ou proches du désert dans les deux cas), réussi à terminer leur film dans des délais extrêmement courts. 

MAMBAR PIERRETTE en revanche a connu une genèse plus lente, mais acrobatique puisque la documentariste Rosine Mbakam l'a commencé en 2019 comme un modeste premier court-métrage de fiction d'une trentaine de minutes et le finira comme un long-métrage encensé par la critique à Cannes quatre ans plus tard, au prix de lourds sacrifices - et grâce à une première aide à la production du Fonds Image de la Francophonie en 2019, puis à la finition en 2022. Nous reviendrons plus avant sur les nombreuses sélections en festival de ce film.

Saluons, dans un programme où l'on retrouve bien sûr les plus grands films de Cannes, le soin constant accordé par les sélectionneurs de Toronto aux films africains, afrodescendants et francophones en général.  Le public canadien (et les nombreux professionnels états-uniens toujours présents au TIFF) pourront cette année voir les oeuvres (ou simplement rencontrer) :  Nadine Labaki, Ladj Ly, Raoul Peck ou encore la jeune Marocaine Asmae El Moudir (LA MERE DE TOUS LES MENSONGES, Oeil d'Or ex-aequo à Cannes 2023). Apolline Traoré sera l'invitée d'une table ronde sur l'évolution de l'industrie du film en Afrique. Et l'immortel TOUKI BOUKI de Djibril Diop Mambety fera l'objet d'une soirée spéciale, pour le 50ème anniversaire de sa sortie, en 1973.