A Plus, la chaîne africaine du groupe Canal Plus
La chaîne A Plus, lancée en octobre prochain, pourrait changer la donne en matière de fictions d'Afrique francophone.
La nouvelle chaîne sera sur les écrans le 24 octobre. Elle se veut 100 % africaine et le discours des responsables du groupe Canal Plus (y compris celui du Président, Bertrand Méheut) semble refléter une véritable conviction : l'avenir se joue en Afrique. Toutes offres confondues, 40 % des abonnés du groupe sont aujourd'hui hors de France et le " portefeuille " africain - 1,3 millions d'abonnés - a doublé entre fin 2011 et fin 2013. Pour lancer la chaîne A Plus, le groupe Canal Plus a investi dans un bureau à Abidjan, avec recrutement d'une équipe de quinze personnes (dirigée par le Français Damiano Malchiodi qui s'appuiera sur une responsable des programmes sénégalaise, venue de Télé Futurs Média).
Présentée comme une chaîne de divertissement, A plus comportera quelques magazines (Star chef, Blackamorphose, Island Africa Talent) mais l'essentiel de sa grille sera composé de fictions africaines. Comme on pouvait s'y attendre, au départ, c'est l'Afrique anglophone qui tient le haut du pavé avec des séries sud-africaines (The Wild, Inkaba, High rollers) mais aussi ghanéennes (Adams Apples, An African City) ainsi que des films nigérians. On trouve également des sitcoms afro-américaines et une télénovela angolaise (Windeck). Et l'Afrique francophone ? C'est la priorité, assurent les responsables d'A plus mais on sent bien qu'il y a là un pari sur l'avenir et pas encore une réalité solide. Moins de 20 % des programmes de fiction annoncés dans la brochure de la nouvelle chaîne viennent d'Afrique francophone. Encore a-t-il fallu pour cela remonter dans le temps, jusqu'à exhumer la série " Kadi Jolie " [soutenue par le Fonds Francophone, ndlr], d'Idrissa Ouédraogo, qui fête ses quinze ans, ou " Docteur Boris ", série ivoirienne lancée il y a six ans. La nécessité de piocher dans le patrimoine pour répondre à la demande avait déjà été soulignée sur ce site[1]. Mais une nouvelle chaîne se doit d'apporter du neuf et ce n'est pas la série burkinabèe " Commissariat de Tampy " [soutenue par le Fonds Francophone, ndlr], déjà vue et revue (notamment sur TV5Monde) qui fera la différence. La série " Aimé malgré lui " a beau être annoncée comme inédite, TV5 l'a déjà diffusée et on la retrouve actuellement sur la web-TV TV5Monde plus Afrique.
Les vraies nouveautés promises pour le lancement de la chaîne A Plus sont la série sénégalaise Tundu Wundu, tournée en wolof et doublée en français, ainsi que " Pango et Wally ", programme court venu du Gabon. Pour 2015, on annonce le retour d'Akissi Delta avec " Ma grande famille " et l'arrivée de la série sénégalaise " C'est la vie " (co-écrite par Marguerite Abouet et réalisée par Moussa Sène Absa) [soutenue par le Fonds Francophone, ndlr].
Mais les responsables de la nouvelle chaîne sont conscients de la faiblesse (en quantité et en qualité) des fictions d'Afrique francophone et du fait que leur part dans les programmes devra progresser rapidement. " Partout dans le monde, le public préfère les fictions locales[2] " souligne François Deplanck, directeur des chaînes et contenus de Canal Plus Overseas[3]. " il n'y a pas de raison que cela se passe autrement en Afrique ". Reste à savoir par quel bout prendre les choses. Le même François Deplanck rappelle que l'investissement dans un épisode de série sud-africaine atteint couramment 40 000 $, tandis que la productrice Akissi Delta, sans jamais être allée à l’école, a pu produire il y a dix ans, avec quelques centaines d’euros par épisode, ce qui reste le plus grand succès en matière de fiction en Afrique francophone, à savoir la série " Ma Famille ". La chaîne A plus s’apprête à investir des montants beaucoup plus conséquents dans la nouvelle série « Ma grande famille ». Plus généralement, la dernière née du groupe Canal plus devrait contribuer à changer la donne en Afrique francophone, en termes d’ambition et de qualité.
[1] Voir l'article " Capital numérique : un projet de renaissance de l'audiovisuel africain " [2] Sauf en France, ironise-t-il, où le public accorde encore sa préférence aux séries américaines. [3] La filiale du groupe Canal Plus chargée de l'international.